La prise de parole en public est le quotidien de nombreuses personnes engagées en politique ou dans le milieu militant. Qu’elle soit vécue de manière anxiogène par certains ou embrassée naturellement par d’autres, elle n’en reste pas moins complexe. Répertoriée comme une des peurs communes à l’être humain, parler avec aisance devant une assemblée est un réel apprentissage. Devenir un orateur de talent, cela se construit. Confiance en soi, gestion de sa posture et utilisation des mots justes, Les Mariannes vous explique en détail comment maîtriser son discours face à un auditoire.
Réussir sa prise de parole en public : entre apprentissage et confiance en soi
Prendre la parole en public est un exercice qui ne s’improvise pas et qui nécessite, en amont, une préparation par étape.
Préparez sérieusement le fond de votre discours
L’élaboration de la structure et du fond de votre discours est une phase à ne pas négliger. En effet, c’est lors de sa rédaction, que vous allez mettre en forme vos idées et les messages à communiquer à votre audience. Vous devez être capable de répondre à ces 5 questions afin que votre allocution soit cohérente.
- Quel est mon public ?
- Quel est mon objectif ?
- Quel est mon message ?
- Quelles émotions vais-je transmettre ?
- Que doit retenir mon auditoire ?
Rédiger consciencieusement votre intervention permet de donner du sens à vos pensées et de les maîtriser le jour de votre performance oratoire.
Apprenez à gérer votre stress : faites du trac votre allié
Le trac apparaît avant toute performance et contrairement à la timidité, il est passager.. Ses manifestations peuvent être physiques (accélération du rythme cardiaque, gorge sèche) et cognitives (pensées négatives).
Cet état de trac est lié à la peur de l’échec et à la crainte du jugement de l’autre. Même si cela peut sembler paradoxal, il est nécessaire à la réussite de votre prestation. Justement dosé, il permet de mettre votre corps et votre cerveau en condition. Voyez-le comme un moteur et non comme un frein. Apprenez à l’apprivoiser avec :
- des exercices de respiration inversée qui consiste à inspirer profondément en rentrant le ventre puis à relâcher l’abdomen en soufflant pour expulser tout l’air des poumons ;
- de la relaxation et de la méditation ;
- des exercices de visualisation.
Misez sur la préparation mentale : comment hacker son cerveau ?
Le cerveau ne fait pas la différence entre l’imaginaire et le réel. Il reçoit consciemment et inconsciemment des informations qu’il va traiter en fonction de votre état d’esprit. Par exemple, si vous vous visualisez en situation d’échec, il y a de forts risques que votre prestation ne se déroule pas de la meilleure façon.
L’idée est d’hacker votre cerveau c’est-à-dire d’y induire des mécanismes et des images de réussite. En amont de votre discours, imaginez-vous en train de parler avec aisance tout en y prenant du plaisir. Ainsi, lorsque vous serez en conditions réelles, votre cerveau aura assimilé cette expérience comme positive. Vous serez dans de meilleures circonstances pour atteindre le succès.
Être précis et clair : l’importance du langage verbal
Utilisez un langage adapté à votre audience
La réussite d’une prise de parole en public repose aussi sur la connaissance de votre audience. Plus vous savez à qui vous vous adressez, plus votre communication sera efficace et adaptée.
Pour construire votre persona, il est important de connaître :
- son environnement ;
- sa situation professionnelle ;
- ses attentes ;
- sa situation familiale ;
- son âge ;
- ses valeurs.
Une fois que vous avez établi le portrait-robot de votre auditoire, ajustez votre niveau de langage. En communication orale, il est recommandé de parler à la voix active et d’utiliser des structures simples. Votre manière de vous exprimer doit être spontanée. N’employez pas un jargon technique alors que vous vous adressez à des novices. En effet, n’oubliez jamais que l’objectif de votre discours est de faire passer un message !
Soyez clair dans votre message lors de votre prise de parole en public
Les études menées par Roger Mucchielli, agrégé de philosophie, démontrent que nous ne retenons que 20 % de ce que nous entendons. En prenant en compte cette donnée, il est nécessaire que votre discours soit clair et aille à l’essentiel.
Une majorité des présentations orales n’ont pas l’impact escompté, car le message transmis n’est pas limpide pour l’assemblée. L’erreur commune est de vouloir tout dire afin de prouver au public que nous sommes des experts dans notre domaine. Résultat ? L’audience est noyée sous un flot d’informations et la communication échoue.
Une prestation cohérente repose sur l’utilisation des bons mots et du motto Less is more (le moins est plus, en français). En d’autres termes, tout ce qui ne renvoie pas à votre message doit être supprimé de votre discours.
Illustrez vos propos afin de donner du sens et du rythme à votre discours
Donnez vie à votre présentation orale en illustrant vos propos. En amont, préparez des anecdotes en lien avec votre message. Elles peuvent être drôles, bouleversantes, voire dramatiques. L’objectif est qu’elles procurent des émotions à votre audience.
En ajoutant une touche personnelle à votre discours, vous cassez la monotonie, maintenez l’attention des spectateurs et donnez une vision concrète de vos idées.
Entraînez-vous à parler à un public avec des exercices de préparation
Les mots et la façon de les employer ont une importance capitale lorsque vous vous exprimez. Christine Abadie, coach en prise de parole en public, délivre 4 points clés pour réussir à bien communiquer.
- Utiliser un langage fluide, cohérent avec des tournures de phrases adaptées à votre auditoire. La sémantique doit être riche, mais accessible pour tous ! Vous pouvez noter dans un carnet vos expressions favorites afin de les retenir.
- Faire des phrases simples contenant sujet, verbe et complément.
- Travailler votre élocution en vous entraînant à répéter des virelangues (Tu t’entêtes à tout tenter, tu t’uses et tu te tues à tant t’entêter, par exemple.)
- Supprimer les mots parasites tels que euh, ah, donc, alors…
Dans son interview pour le podcast Les Mariannes, Christine Abadie propose deux exercices qui permettent de parfaire votre voix.
- Le premier est la mobilisation de votre voix pleine par la respiration ventrale. Vous pouvez, par exemple, lire des textes à voix haute en étant allongé.
- Le second, appelé exercice de Démosthène (orateur grec du IVe siècle av. J.-C.) consiste à lire pendant environ 5 minutes un texte en tenant un crayon dans sa bouche. Au bout d’une dizaine de jours, votre élocution sera déjà métamorphosée.
Afin de conscientiser vos défauts, Christine Abadie propose une méthode accessible à tous : s’enregistrer. C’est l’un des meilleurs exercices à réaliser avant une prise de parole, car il permet de rendre compte de tous les tics de langage et de s’apercevoir de la maîtrise (ou non) de la future présentation.
Enfin, si vous souhaitez aller plus loin dans cet exercice, vous pouvez faire appel à un coach professionnel.
Capter son audience : pensez au langage paraverbal et non verbal
Donnez vie à votre présentation orale : ton, intonation et rythme
La voix est un des piliers de la prise de parole, car elle permet d’insuffler une émotion et rend le discours authentique. Avoir une voix posée, cela se travaille en agissant sur plusieurs composantes.
- Le rythme doit être justement posé et fluide. Si vous parlez trop vite sous l’effet du stress, vous risquez de perdre votre audience. Au contraire, votre public s’ennuiera si vous vous exprimez trop lentement. N’hésitez pas à faire des pauses entre deux idées voire deux phrases afin de donner de l’éloquence à vos mots.
- Le volume : parlez suffisamment fort pour capter l’attention de vos spectateurs et appuyez sur certains mots pour augmenter leur impact.
- La modulation : les timbres aigus ont tendance à trahir un état d’anxiété et sont moins agréables à l’oreille. Les voix graves sont très appréciées, c’est notamment le cas à la radio. Toutefois, il n’est pas nécessaire de modifier votre timbre naturel, mais plutôt d’apprendre à le contrôler.
- L’intonation peut suivre la ponctuation de votre présentation afin d’y impulser du rythme telle une mélodie.
Transmettez un message cohérent avec votre corps : le langage non verbal
La communication non verbale est complémentaire au langage oral. En effet, avant même de vous exprimer, votre corps envoie des signaux à l’auditoire. Vos mots doivent être congruents : votre gestuelle doit être identique à ce que votre bouche dit.
La posture
Votre présence doit occuper l’espace. Une bonne posture consiste à se tenir droit, face à son auditoire tout en gardant des gestes souples et naturels. Osez parler avec vos mains si c’est une pratique que vous faites spontanément, car le corps supporte la parole.
Le regard
Le regard permet de capter l’attention du public et de créer une connivence avec lui. Lorsque vous vous exprimez, balayez l’assemblée et ne fixez jamais un seul et unique point au risque de vous enfermer dans une conversation. C’est grâce à vos yeux que vous allez percevoir les réactions de votre auditoire et que vous pourrez, au besoin, moduler votre langage verbal.
Vous vous sentez totalement désemparé face à des spectateurs qui semblent distraits ? Captez l’attention des personnes bienveillantes afin de reprendre confiance en vous.
Impliquer et créer un lien avec son auditoire
Prenez en compte votre audience lors de votre prise de parole en public
L’une des erreurs majeures lorsque vous prenez la parole en public est de parler uniquement de vous. Ne ratez pas votre entrée en matière en oubliant d’inclure votre audience cible. Une personne concernée retiendra davantage vos idées, votre message et se sentira proche de vous.
Vous êtes engagé.e en politique ? Parlez des besoins de vos concitoyens, de leurs valeurs et de leur quotidien. Vous êtes actif.ive dans les causes féministes ? Dressez le portrait des femmes qui vous écoutent et abordez leur histoire.
Interagissez avec l’assemblée afin de communiquer efficacement
Une prise de parole réussie est à la fois sincère, cohérente et dynamique. Vous pouvez rendre votre intervention plus vivante en y introduisant des interactions : questions, sondages, retour d’expérience…
N’hésitez pas à interpeller votre public, quel que soit le moment de votre discours. Ces courtes pauses permettent de le maintenir en alerte et de susciter leur intérêt. En effet, rien de plus ennuyeux qu’un long monologue…
Restez vous-même
L’authenticité reste la clé d’une prise de parole réussie. Rien de plus triste qu’un discours qui ne vous ressemble pas. Organisez votre message, travaillez votre voix, votre posture et surtout, restez vous-même ! Vous perdez vos mots ? Tentez l’humour et l’autodérision afin de détendre l’atmosphère. Une personne vous interpelle et vous coupe la parole ? Faites une pause. Restez poli et rappelez les règles de bienséance. Votre accent vous gêne ? Assumez-le ! Il fait partie de vous et en prononçant un discours devant un public, c’est vous que l’on vient voir.
Prendre la parole en public est indéniablement un exercice complexe qui demande de la préparation et une bonne dose de confiance en soi. En apprenant à gérer votre trac, à poser votre voix et à impliquer votre audience, vous arriverez sans aucun doute à transmettre votre message.
⏩ Vous souhaitez en savoir plus ? Dans l’épisode 16 des Mariannes, Christine Abadie, coach, vous explique comment réussir sa prise de parole en public.
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Sources :
- Desberg, P. (1996). Pour en finir avec le trac. Les éditions de L’Homme.
- Mucchielli, R. (2020). Les méthodes actives, dans la pédagogie des adultes. Les éditions ESF Sciences Humaines
- Karen Kangas Dwyer & Marlina M. Davidson (2012): Is Public Speaking Really More Feared Than Death?, Communication Research Reports, 29:2, 99-107